Le courant passe, mais comment? Cette question est centrale pour la transition énergétique. En effet, ce n’est pas seulement la production d’électricité qui doit être durable, mais aussi son transport. En tant que société nationale du réseau de transport, Swissgrid est confrontée au défi de développer le réseau à très haute tension tout en conciliant les aspects écologiques, techniques et économiques. Une étude sur l’écobilan montre que les lignes aériennes sont nettement plus avantageuses sur le plan écologique que les lignes câblées souterraines. Ce constat surprenant incite à repenser les choses.
Écobilan sur l’ensemble de la durée de vie
À première vue, la ligne câblée souterraine constitue un atout majeur pour le paysage. Dans le cas des lignes câblées souterraines, une grande partie de l’infrastructure des lignes est enfouie de manière invisible dans le sol. Mais les lignes câblées souterraines laissent elles aussi des traces dans le paysage, par exemple sous la forme de tranchées dans la forêt, de routes d’accès, d’installations de compensation pour réduire la tension et de stations aéro-souterraines reliant la ligne aérienne à la ligne câblée souterraine.
En y regardant de plus près, les lignes aériennes et les lignes câblées souterraines présentent toutes deux des avantages et des inconvénients spécifiques lors de la conception, de la construction, de l’exploitation et de la maintenance. Pour chaque projet de réseau, Swissgrid examine aussi bien les variantes de lignes aériennes que les variantes de câblage et analyse leurs impacts sur l’environnement tout au long de leur cycle de vie. Pour ce faire, Swissgrid a commandé une étude d’écobilan, réalisée par Umtec Technologie AG conformément aux recommandations méthodologiques pour les écobilans de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) et vérifiée par un expert externe en matière d’écobilan. L’étude compare les impacts sur l’environnement des lignes aériennes et des lignes câblées souterraines aux niveaux de très haute tension de 380 kV et de 220 kV. La méthodologie se base sur des normes reconnues et utilise comme critères d’évaluation les points de charge environnementale (PCE), les émissions de gaz à effet de serre (CO2eq) et les dépenses énergétiques cumulées. L’évaluation est réalisée sur la base du transport de 1 GWh d’énergie électrique au niveau de très haute tension de 380 kV ou de 220 kV sur une longueur de ligne de 1 km pendant la période considérée, de l’extraction des matières premières jusqu’au démantèlement (soit environ 80 ans).
Les résultats de l’écobilan sont clairs: les lignes câblées souterraines sont jusqu’à trois fois moins performantes sur le plan écologique que les lignes aériennes. La raison principale: les lignes câblées souterraines nécessitent beaucoup plus de matériel et leur fabrication est très gourmande en énergie. À cela s’ajoutent des pertes de transport et de compensation élevées et un remplacement coûteux après environ 40 ans, la durée de vie des lignes aériennes étant deux fois plus longue.
Analyse de sensibilité: la durée de vie, le mix électrique et le choix des matériaux comptent
L’étude d’écobilan montre clairement que certains paramètres ont une influence considérable sur les impacts sur l’environnement des technologies de transport. L’analyse de sensibilité examine l’impact des modifications de ces paramètres, notamment la durée de vie, le mix électrique et le choix des matériaux, sur le bilan environnemental de l’infrastructure.
- Plus un système de câblage est utilisé longtemps, plus les impacts sur l’environnement de sa fabrication et de sa construction sont réduits sur l’ensemble de sa durée d’utilisation. Dans le réseau de 220 kV, l’allongement de la durée de vie permet de réaliser jusqu’à 13,5% d’économies.
- L’analyse de l’écobilan démontre que les pertes de transport et de compensation représentent une part importante des impacts sur l’environnement. Le mix électrique joue ici un rôle central. Si l’on prend en considération un mix renouvelable de l’électricité transportée en Suisse, les impacts sur l’environnement des pertes de transport diminuent de plus de 60%. Néanmoins, le message principal reste le même: les lignes aériennes sont avantageuses sur le plan écologique, en particulier au niveau de 380 kV.
- D’un point de vue global, les matériaux utilisés lors de la phase de fabrication et de construction dominent l’écobilan. Dans le cas des lignes câblées souterraines, les matériaux sont responsables de jusqu’à 80% des impacts sur l’environnement, selon la méthode de construction utilisée. Les composants à forte teneur en métal, comme les câbles en cuivre, le béton ou les tuyaux de protection de câbles en acier, ont un impact particulièrement élevé sur l’environnement. L’utilisation de matériaux recyclés ou de matériaux alternatifs offre ici un potentiel d’optimisation.
Que les pylônes électriques soient distants de 400 ou 600 mètres, cela ne fait guère de différence pour l’environnement. Moins de distance signifie certes moins de matériel par pylône, mais aussi plus de pylônes au total. Les impacts s’équilibrent. D’un point de vue écologique, la portée ne compte guère, les aspects en matière de technique et d’aménagement du territoire étant plus importants lors du choix du site.
Planification numérique des lignes: la durabilité est intégrée
Swissgrid utilise le logiciel Gilytics pour la planification des tracés. Cet outil innovant permet d’identifier, sur la base de faits, les corridors et les itinéraires optimaux pour les projets de lignes de transport. Pour cela, il prend en compte des critères techniques, juridiques, économiques et d’aménagement du territoire, et à l’avenir également des aspects écologiques tels que l’empreinte carbone et les impacts sur l’environnement. L’intégration des données de l’écobilan dans la planification numérique est une étape importante pour ancrer systématiquement la durabilité. Il sera ainsi possible d’identifier, dès les premières phases de planification, des variantes ayant un impact moindre sur l’environnement et d’en tenir compte dans la prise de décision.
Conclusion: la durabilité n’est pas toujours invisible
Les lignes aériennes sont visibles, mais aussi judicieuses sur le plan écologique. L’étude d’écobilan montre que les lignes aériennes au niveau de la très haute tension ont systématiquement des impacts sur l’environnement plus faibles que les méthodes de construction des lignes câblées souterraines. Les résultats sont stables, même si certains paramètres sont modifiés.
Le développement du réseau ne doit pas seulement être bien pensé sur les plans technique et économique, mais aussi sur le plan écologique. Swissgrid s’engage pour que la durabilité soit prise en compte dès le début, et ce de manière numérique, transparente et basée sur des faits.
De manière générale, les lignes câblées souterraines ne peuvent être utilisées que de manière limitée sur le réseau suisse à très haute tension. Leurs propriétés physiques rendent difficile une exploitation stable du réseau et l’élimination des perturbations. Une proportion trop élevée peut mettre en péril la sécurité d’approvisionnement. Pour les futurs projets de réseau, il convient donc d’évaluer dans une perspective globale si une ligne câblée souterraine peut être construite. Plus d'informations dans la vidéo suivante.
Swissgrid: une stratégie climatique qui prend en compte l’ensemble de la chaîne de création de valeur
Dans le cadre de sa stratégie de développement durable, Swissgrid a pour objectif de réduire ses émissions directes et indirectes des scopes 1 et 2 à zéro émission nette d’ici 2040. L’utilisation de données d’analyse de cycle de vie (ACV), qui servent de base à l’identification des principaux générateurs d’émissions tout au long de l’infrastructure de réseau et de la chaîne de création de valeur de Swissgrid, constitue à cet égard un élément central pour la conception de la stratégie climatique. Conformément aux résultats des écobilans des technologies de transport, un accent important est mis sur la réduction et la décarbonation des pertes de transport, qui représentent actuellement environ 95% des émissions directes et indirectes de l’entreprise. En outre, Swissgrid s’emploie à recenser systématiquement les émissions indirectes (scope 3) des matériaux utilisés dans les phases de fabrication et de construction et à les réduire à long terme. Les premiers projets pilotes menés dans le cadre de la stratégie d’acquisition durable montrent que de nombreux fournisseurs sont déjà en mesure de fournir des données pertinentes. C’est une base importante pour un développement de l’infrastructure respectueux du climat tout au long de la chaîne de création de valeur de Swissgrid.
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